Systèmes intégrés de gestion des actifs d’infrastructure (IIAMS)
Composants et valeur ajoutée pour industries et organisations riches en actifs
Processus de gestion des actifs d’infrastructure
Les réseaux d’infrastructure sont des systèmes complexes qui procurent une vaste gamme de produits et de services essentiels. Les décisions prises en lien avec le développement, la gestion et l’utilisation des systèmes d’infrastructure, sans reconnaître toute leur complexité, entraînent le gaspillage de ressources financières, environnementales et sociales. Conséquemment, les professionnels des travaux publics éprouvent de la difficulté à gérer ces actifs de manière efficace et efficiente. Au cours des dernières décennies, le développement et l’accumulation des connaissances dans ce domaine, de même que les avancées technologiques, ont fourni aux gestionnaires d’infrastructure des outils et des techniques leur permettant de surmonter ces difficultés. L’objectif que servent les connaissances et les processus des travaux publics en matière de gestion des actifs est de faciliter et d’améliorer la prise de décisions portant sur le développement, l’utilisation, l’entretien, la cession et le remplacement des actifs d’infrastructure. Selon la définition fournie par l’American Public Works Association (APWA), les travaux publics sont des structures et des installations mises en place ou acquises par des organismes publics dans le but de loger des fonctions gouvernementales et ainsi fournir des services d’eau, d’électricité, de gestion des déchets, de transport et autres, pour faciliter l’atteinte d’objectifs sociaux et économiques communs. En vertu de cette définition, l’APWA répertorie dix-huit catégories de travaux publics. Parmi celles-ci, on retrouve la voirie (routes, ponts, etc.), les transports (transport en commun, transport ferroviaire, aéroports), l’eau (infrastructure de l’eau et des eaux usées), la gestion des déchets, la production et la distribution d’énergie, les parcs de véhicules et d’équipement, les installations, les parcs, etc.
Systèmes de gestion des actifs d’infrastructure (IIAMS)
Les systèmes de gestion des actifs d’infrastructure (integrated infrastructure asset management systems, ou IIAMS) sont des solutions technologiques qui permettent la gestion de tous les processus pour divers travaux publics, au sein d’une plateforme unique. Le choix du bon IIAMS et l’utilisation qu’on en fait peuvent accroître l’efficacité et l’efficience de la prise de décisions par les gestionnaires et les propriétaires d’actifs. Pour chaque catégorie d’actifs d’infrastructure, les IIAMS couvrent généralement une gamme de processus incluant l’inventaire des actifs, la collecte des données, l’inspection des actifs, la collecte de données sur le rendement des actifs, l’entretien des actifs et son historique, la gestion de la main-d'œuvre, du matériel et de l’équipement, les systèmes d’aide à la décision et, finalement, la visualisation des données et l’intelligence d’affaires. Les systèmes de gestion des actifs d’infrastructure municipale (MIIAMS) sont une sous-catégorie des IIAMS; ils peuvent être personnalisés de façon à gérer les infrastructures municipales correspondant à la liste de travaux publics susmentionnée (routes, ponts, etc.). Nous aborderons ci-dessous les composants et sous-composants des IIAMS, de même que les avantages qu’ils procurent.
Modules et sous-composants des IIAMS en formule complète
Les systèmes de gestion des actifs d’infrastructure (IIAMS) en formule complète comprennent généralement quatre modules principaux que l’on résume dans la figure 1.
Figure 1. Modules et sous-composants des IIAMS en formule complète.
Le premier module central de ces systèmes est la gestion de l’inventaire et de l’entretien des actifs. Ce module loge plusieurs sous-composants. Dans le jargon de l’industrie, on l’appelle « gestion de la maintenance assistée par ordinateur » (computerized maintenance management system, ou CMMS) ou « gestion des actifs de l’entreprise » (enterprise asset management system, ou EAM).
Le sous-composant principal de ce module comprend l’inventaire des actifs et la collecte de données. La mise à disposition de grandes bases de données, la puissance computationnelle accrue et le développement de technologies novatrices de collecte de données en masse (ex. : traitement d’images, télédétection, intégration complexe avec des bases de données existantes, etc.) permettent aux gestionnaires d’actifs de voir l’ensemble de leur réseau, divers profils au sein de leur inventaire d’infrastructure, chaque actif individuellement, et même les attributs détaillés de chaque actif sur demande. Les autres étapes de la gestion de cycle de vie des actifs (acquisition, cession, remplacement) sont également traitées par le sous-composant d’inventaire des actifs.
Un autre sous-composant de ce module comprend la gestion de l’inspection et de l’entretien des actifs. La fonction principale de ce sous-composant est de déclencher rapidement et précisément les tâches d’entretien, et de consigner l’historique d’entretien pour chaque actif. Selon le niveau de spécialisation du sous-composant de gestion de l’inspection et de l’entretien, ce dernier peut régir une ou plusieurs catégories de stratégies de maintenance, lesquelles sont énumérées ci-après, en ordre croissant de complexité : entretien réactif (bris suivis de réparations), entretien préventif (activités d’entretien planifiées), entretien prédictif (conditionnel), entretien axé sur la fiabilité (selon l’historique, la fréquence et les causes des défaillances), entretien normatif (selon les résultats d’analyses avancées qui combinent des facteurs issus de toutes les autres stratégies d’entretien, et prescrivent un régime d’entretien propre à chaque actif). En outre, la main-d'œuvre, l’équipement, les ressources matérielles et les coûts engagés seront consignés pour chaque actif en tant que parties intégrantes des procédés du sous-composant de gestion de l’inspection et de l’entretien.
L’ajout de systèmes d’information géographique (SIG) en tant que sous-composants du présent module permet aux gestionnaires d’actifs de visualiser l’inventaire de leurs actifs, leur rendement et leur interaction, et d’en faire le rapport dans n’importe quelle zone géographique. Et enfin, des modules avancés de CMMS et d’EAM peuvent s’intégrer à d’autres systèmes au sein de l’organisation (ex. : système de finance). Cela permet l’application de règles et de contraintes financières et budgétaires à toutes les transactions liées à la gestion des actifs.
La modélisation du rendement des actifs est le deuxième module type des IIAMS. Au sein de ce module, des fonctions de rendement propres à chaque catégorie d’actifs (ex. : chaussée) ou sous-catégorie d’actifs (ex. : chaussée souple) sont employées pour projeter le rendement des actifs d’infrastructure. Ces fonctions sont en mesure de modéliser le comportement des actifs selon plusieurs facteurs : environnement (ex. : température), cas d’utilisation (ex. : volume de trafic), pratiques d’entretien (inaction, routine), etc. Le développement de fonctions de rendement des actifs est un processus analytique complexe et chronophage qui inclut la collecte et l’analyse de grandes quantités de données par des chercheurs. Une fois les fonctions développées, les gestionnaires d’actifs peuvent les étalonner et les utiliser pour modéliser le rendement d’actifs de chaque catégorie, selon leurs propres paramètres.
Le troisième module des IIAMS est le système d’aide à la décision (DSS). Ce module est un postprocesseur de modélisation mathématique qui rassemble les données du CMMS et des modules de modélisation du rendement des actifs afin de générer tous les scénarios possibles en gestion de l'inventaire et de l’entretien pour des sous-ensembles provenant du réseau d’actifs au complet. Les utilisateurs peuvent définir les paramètres qui régissent la génération de scénarios. De manière générale, ces scénarios regroupent divers ensembles d’actifs dans une ou plusieurs catégories, diverses stratégies et activités d’entretien, diverses contraintes budgétaires et plusieurs horizons prévisionnels (ex. : un an, quatre ans, dix ans). Après que tous les scénarios aient été générés, le DSS résout les modèles mathématiques et procure aux gestionnaires d’actifs des scénarios optimaux en matière de gestion de l’inventaire et de l’entretien, qui permettront de respecter toutes les contraintes abordées. Le résultat de ce processus offre aux gestionnaires d’actifs un ensemble optimal montrant, pour une année donnée, les projets d’entretien et les décisions de gestion du portefeuille d’actifs de l’organisation. La part limitée du budget allouée à la gestion des actifs est ainsi dépensée de la façon la plus efficace, et les actifs de l'organisation sont utilisés au mieux de leur capacité à long terme.
Le quatrième module d’une suite IIAMS complète correspond à l’intelligence d’affaires (BI) et à la génération de rapports. Ce module loge des outils et des assistants pour la visualisation des données (ex. : diagrammes, tableaux de bord dynamiques, etc.) et permet aux utilisateurs de générer des rapports efficacement, relativement à de grandes bases de données stockées dans le système. Ces rapports de sortie peuvent être produits en différentes structures et dans plusieurs formats (ex. : rapports tabulaires avec agrégations définies par l’utilisateur, rapports statistiques, graphiques, rapports de conception unique, etc.). Les assistants de BI et de génération de rapports sont des outils essentiels qui rendent les résultats des DSS intelligibles auprès des gestionnaires d’actifs. Les résultats découlant de ces outils (ex. : rapports, analyses par simulation, etc.) sont des blocs d’information propulsés par les données qui facilitent la prise de décisions stratégiques et tactiques chez les gestionnaires d’actifs.
Comme mentionné, ces quatre modules forment ensemble une suite IIAMS complète qui couvre tout le processus de gestion des actifs d’infrastructure dans les organisations (ex. : municipalités) pour les portefeuilles d’actifs d’infrastructure qu’elles possèdent ou qu’elles gèrent. Toutefois, étant donné les nombreuses connaissances, données techniques et fonctionnalités couvertes par ces quatre modules, les solutions d’infrastructure types que l’on retrouve sur le marché ne sont pas des suites complètes. La plupart de ces solutions couvrent un ou deux modules, et sont même personnalisées selon certaines catégories d’actifs. Afin de pallier cette lacune, les organisations achètent généralement une plateforme qui permet de gérer les quatre modules et de consolider ces solutions par l’intermédiaire de l’intégration. Voilà une approche fondée, actuellement utilisée par de nombreuses agences et organisations dans l’industrie. On retrouve parmi ces plateformes le logiciel Maximo et son ensemble d’extensions (ex. : CMMS, pack AASHTOware pour gestion de ponts, pack MicroPaver pour gestion de chaussée, packs dTIMs et AgileAssets pour gestion d’infrastructure de transport, et pack HEC-HMS pour gestion des analyses hydrologiques et des structures hydrauliques).
Avantages des IIAMS pour les industries et organisations riches en actifs
En ayant connaissance des composants et des fonctions des IIAMS, il est possible de comprendre comment les industries et organisations riches en actifs telles que les municipalités tirent profit de leur implantation.
D’un point de vue commercial, ces systèmes procurent aux gestionnaires d’actifs une vision à différents niveaux : réseau, catégories et sous-catégories d’actifs, actifs individuels, attributs d’actifs et historique d’entretien des actifs. Cette visibilité, combinée aux outils d’analyse avancés offerts avec ces suites logicielles, permet une prise de décisions s’appuyant sur les données, et ce, pour toutes les catégories d’actifs à l’échelle de l’organisation. En plus, quand un seul IIAMS englobe toutes les catégories d’actifs d’une organisation, de même que leurs processus de gestion, les gestionnaires d’actifs peuvent procéder à des échanges aux frontières qui séparent les différentes catégories d’actifs. À titre d’exemple, il est possible de faire passer des informations entre les programmes de gestion des routes et des ponts. Qui plus est, en employant de tels systèmes et en choisissant l’horizon prévisionnel adéquat, les gestionnaires d’actifs peuvent rendre compte du coût d’exploitation total des actifs plutôt que du coût initial de leur acquisition. En bref, les décisions qui en découlent sont durables financièrement et rationnellement.
D’un point de vue technologique, les IIAMS autonomes, qui couvrent toutes les catégories d’actifs au sein d’une organisation, permettent une gestion de transition et des processus de formation simples pour tous les profils d’utilisateurs. Par un raisonnement semblable, on peut conclure que les processus de mise à jour de la plateforme, d’amélioration et d’intégration avec des systèmes externes (ex. : ERP) deviennent simples, contrairement au scénario selon lequel plusieurs systèmes sont employés pour gérer les actifs de l’organisation. Pour toute question au sujet des systèmes de gestion des actifs d’infrastructure, n'hésitez pas à contacter un de nos experts!
Sources
Waheed Uddin, W. Ronald Hudson, Ralph C. G. Haas. Public Infrastructure Asset Management, Second Edition (2013).
Lemer. A. Progress Toward Integrated Infrastructure-Assets Management Systems: GIS and Beyond. APWA International Public Works Congress NRCC/CPWA Seminar Series “Innovations in Urban Infrastructure” (1998).